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par Marthe Lamothe
Extrait tiré des pages 71 à 73 du volume de Marthe LAMOTHE, « Des horizons nouveaux : parcours initiatique pour les recommençants », éditions NOVALIS (2003), 296 pages.
Abram vivait près de la ville d’Ur, située dans l’Irak d’aujourd’hui. C’était un nomade. Il vivait sous la tente. Il avait un très grand troupeau de moutons, de chèvres, mais probablement aussi des ânes, des chameaux. Il faisait partie de tout un clan de bergers.
Dans les années 1850 avant Jésus Christ, la situation des nomades de cette région est difficile. La ville située près de leurs pâturages s’agrandit et les repousse plus loin… comme bien des pauvres dans des grandes villes encore aujourd’hui… On les soumet à toutes sortes de lois, on les surveille, on souhaite qu’ils s’en aillent.
Les nomades continuent pourtant de rêver d’un pays tranquille, à l’écart des grandes villes, où les pâturages seraient nourrissants pour leurs troupeaux, où l’eau serait facile à trouver. Alors, ils décident de partir, de lever le camp, d’aller ailleurs. Abram va-t-il partir lui aussi? Il commence à se faire vieux.
Le soir autour du feu, il me semble qu’il a dû se poser sérieusement la question : « Vaut-il mieux partir vers l’inconnu ou rester ici, malgré toutes les insatisfactions que je ressens? »
Comme tout être humain, Abram porte de grands désirs, de grands rêves et souhaiterait bien les voir se réaliser. Il aimerait avoir un fils à qui il pourrait laisser tout son troupeau en héritage. Avoir un coin de terre où s’installer avec ses bêtes. Être reconnu comme un être humain, digne, pas seulement un nomade quelconque qu’on repousse. Il se demande si ses rêves ont plus de chances de se réaliser là où il est ou ailleurs.
Abram est habité par cette question. Il y réfléchit. Au fond de lui-même, il ressent un appel très fort, irrésistible même à partir… à quitter ses habitudes… à quitter les dieux de cette région… à quitter le coin de pays où il séjourne… à partir vers quelque chose d’autre… ailleurs… il ne sait pas encore quoi exactement, mais il pressent que ce sera meilleur pour lui. C’est comme s’il savait intérieurement qu’il lui fallait se mettre en recherche de quelque chose d’autre… qu’il lui fallait faire confiance à autre chose… à un autre dieu. Comme s’il s’entendait dire : « Pars pour toi. Entre dans ce grand mouvement de vie que tu ressens. C’est moi, ton Dieu, qui t’attire. »
Avec cette conviction qu’il lui fallait partir, Abram a ressenti aussi une promesse intérieure, comme si ce dieu lui promettait de lui donner ce qu’il avait désiré toute sa vie : une terre, une descendance, un nom.
Et Abram a fait confiance à cette voix intérieure. Il a cru en cette promesse. Il a choisi de partir vers quelque chose de meilleur, même s’il ne savait pas vraiment comment cela se réaliserait. Cette voix intérieure était plus forte que ses hésitations. Il lui semblait qu’elle le mettait au large, qu’elle lui donnait de la liberté. Comme la voix d’un dieu.
Et Abram, qui avait le goût de naître à quelque chose d’autre, est parti. Il a fait confiance à cette voix qu’il pressentait comme la voix d’un dieu. Il a été disponible à son appel intérieur.
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