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Hommage à Frédérick, notre fils
Récits de vie
13 novembre 2012

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Témoignage de Francine Desharnais et de Denis Pépin, donné à l’occasion des funérailles de leur fils Frédérick, 13 ans, décédé le 19 mai 1991, victime du sang contaminé.

Nous avons le goût de commencer par vous raconter une histoire très belle qui a contribué à alléger la douleur que nous avons vécue durant la maladie de Frédérick et à l’occasion de son départ.

Il était une fois un homme juste et bon, que la vie avait gâté. Tout à coup, sans qu’il comprenne pourquoi, l’épreuve s’abattit sur lui. Ses troupeaux furent décimés, sa maison et ses champs brûlèrent. Il perdit ses enfants, puis sa femme et se retrouva seul avec un immense chagrin.

Là, du fond de sa solitude et de son désespoir profond, il s’adressa à Dieu : « Qu’ai-je fait pour mériter cela? J’ai toujours vécu honnêtement sans jamais me détourner de Toi, pourquoi m’avoir retiré tout ce que Tu m’avais donné? » Dieu ne répondit pas.

Des amis conseillèrent alors à l’homme de maudire Dieu, mais l’homme s’y refusa. Il ne pouvait croire que Dieu l’ait abandonné. Il continuait à croire que Dieu viendrait à son secours.

Comme s’il n’avait pas encore assez perdu, il tomba malade, perdit ses cheveux, ses dents, et sa peau se couvrit de lèpre. De nouveau il cria son désespoir, suppliant Dieu de lui répondre. Pourquoi cette injustice? Les mêmes amis lui dirent alors qu’il avait sûrement fait quelque chose pour mériter un tel châtiment. Refusant sa culpabilité, l’homme fut alors saisi d’une colère immense, il cria sa rage à Dieu et l’interpella une dernière fois : « Dieu, ne pourrais-Tu, ne serait-ce qu’une fois, tenir compte de l’homme? »

Il y eut un grand silence, puis la voix de Dieu se fit entendre. Dieu se mit à parler du ciel, des étoiles, des saisons, du tonnerre, de la force du vent, de la douceur de l’air, de la beauté des soleils couchants, des arbres en fleurs au printemps, de la naissance des brebis, de l’immensité de la mer…

L’homme se sentit si petit, alors, face à l’univers, qu’il se tut et contempla la beauté du monde.

L’histoire de Job, que vous avez sans doute reconnue, est la plus belle métaphore du deuil que nous connaissions.

À la souffrance, aux deuils, à la mort, il n’y a pas de réponse, ou plutôt, la réponse est ailleurs. Dieu ne répond pas, ou plutôt, il répond sur un autre plan. Et Job, tout d’un coup, dépasse sa souffrance et accède à un autre niveau de conscience.

« Face à ce qui vous dépossède de tout, de tout contrôle, de toute maîtrise, face à l’inconnaissable de la mort, comme l’a écrit Jean Guitton, il nous reste une liberté, un ultime choix, celui d’opter pour l’absurde ou pour le mystère, mais c’est l’absurdité de l’absurde qui nous jette vers le mystère alors même que nous ne comprenons pas. »

C’est en nous tournant vers l’option du mystère que nous avons trouvé un sens à la perte que nous venons de subir.

Frédérick Desharnais-PépinFrédérick, notre fils, a vu sa vie terrestre s’arrêter au début de son adolescence. Quand il nous a quittés en ce matin de la Pentecôte après qu’un rayon de soleil eût caressé son visage, en cette saison où les pommiers resplendissent de toute leur floraison et que toute la nature fait éclater sa vie, nous ne pouvions nous résoudre à ne garder qu’un souvenir triste d’un enfant qui meurt avant d’avoir complété sa vie.

Frédérick n’a pas connu une vie inachevée; il a donné à la brièveté de son existence la plénitude que d’autres prennent quelques décennies à trouver. C’est ce qu’un de nos amis prêtre appelle «atteindre son quota d’amour».

C’est à cette plénitude que nous voulons rendre hommage aujourd’hui comme parents. Mais si nous le faisons, c’est d’abord et surtout pour dire à Frédérick comment sa vie nous aura fait grandir.

  • Frédérick, tu nous as montré comment regarder le monde à travers l’émerveillement de tes yeux d’enfant, toi qui as tellement aimé la vie, la nature, le vent, la neige, la mer…

  • Par ton acceptation des autres sans préjugé, par ton souci de la bonne entente et par ton attachement aux personnes, tu nous as montré une facette importante de l’amour, toi qui disais que ce qui est le plus difficile dans la vie, c’est d’aimer.

  • Mais c’est surtout dans la période éprouvante de ta vie que tu nous as révélé ta grandeur. Ton courage, ta force intérieure, ton acceptation sans révolte de la maladie nous ont aidés à croître nous aussi.

Toi qui disais ne pas avoir peur de mourir, parce que tu croyais qu’il y avait une vie après la mort, toi qui rêvais de devenir architecte, tu as rejoint le Grand Maître d’œuvre qui va sûrement te confier des projets qui te combleront de bonheur.

Frédérick, cet héritage que tu nous laisses, nous désirons le partager. Nous en vivons déjà et si d’autres peuvent en retirer quelque bien, ce sera ainsi que tu continueras de vivre et d’éclairer nos vies. Tu combleras, de cette manière, le désir le plus fondamental qui soit : le désir d’être, de toujours être, de toujours espérer. Bref, le désir d’immortalité.

Frédérick, nous t’aimons!


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